Assurance-emprunteur : une bataille pour l’intérêt général

12 décembre 2017
Assurance-emprunteur : une bataille pour l’intérêt général

Le 1er janvier 2018 devrait être un jour historique pour les détenteurs d’un crédit immobilier et tous ceux qui aspirent à en souscrire un pour accéder à la propriété. Mais le lobby bancaire pourrait faire échouer ce progrès économique et social.

Ces dernières années, la législation a évolué dans un sens favorable aux souscripteurs d’assurance emprunteur. Alors que les banques imposaient la souscription systématique de leur propre assurance-emprunteur avec un prêt immobilier, les lois Lagarde (2010) et Hamon (2014) ont donné le choix aux consommateurs. Ils peuvent désormais, sous certaines conditions, souscrire une assurance autre que celle proposée par leur prêteur. Mais seuls sont concernés les prêts contractés après ces réformes.
Une nouvelle disposition adoptée à l’unanimité en février 2017 au Parlement prévoit de conduire cette réforme à son terme. Elle instaure à compter du 1er janvier prochain un droit à la résiliation annuelle non seulement pour les contrats à venir mais aussi pour ceux en cours, qui concernent près de 6 millions de foyers.
On comprend aisément les craintes des banques qui monopolisent 88% du marché et qui ont attaqué cette mesure devant le Conseil constitutionnel. Pour justifier leur position, elles avancent l’existence d’un risque de « démutualisation » : seule l’assurance « groupe » proposée par les banques permettrait aux emprunteurs « fragiles » d’accéder à un prêt. Ils seraient en quelque sorte subventionnés par les profils jeunes et en bonne santé, qui cotisent plus que ne l’imposerait leur situation et qui préfèreraient logiquement une assurance individuelle offrant de meilleures garanties pour un coût moindre. C’est oublier que les malades sont renvoyés vers des assurances individuelles, qui couvrent 40% des risques aggravés alors que leur part de marché n’est que de 12%. C’est également oublier que la plupart des personnes avec des antécédents médicaux sont refusées par les assurances des banques qui pratiquent une mutualisation à sens unique. Les excédents considérables dégagés par des tarifs élevés avec des marges de 50% ne bénéficient donc pas aux plus faibles, mais principalement aux comptes de résultat des institutions bancaires.
Si elle était confortée par les Sages du Conseil constitutionnel, les consommateurs ne pourraient que se réjouir de l’introduction de plus de concurrence dans un marché oligopolistique que se partagent principalement neuf institutions toutes filiales de banques, soit 6 milliards d’euros de cotisations par an. Le gain de pouvoir d’achat moyen rendu à chaque emprunteur par la fin de cette rente immobilière pourrait atteindre 600 euros par an.
La résiliation annuelle constitue aussi un progrès majeur pour les emprunteurs ayant des problèmes de santé. Les profils jugés « à risques » entraînent une augmentation du coût de l’assurance, c’est-à dire un crédit plus cher. La disposition pourfendue par les banques permettrait aux personnes concernées de diminuer le coût de leurs cotisations, dès que leur santé s’améliore en changeant d’assurance et en bénéficiant d’un véritable droit à l’oubli sur leur passé médical.
La décision revient maintenant au Conseil constitutionnel. L’alternative est simple : maintenir la rente ou bien favoriser la concurrence, le libre choix de l’emprunteur, au bénéfice du plus grand nombre.

Tribune collective

  • MONTARANT Alain, Président du Groupe Macif et RABY Jean-Marc, Directeur Général du Groupe Macif
  • RICHIER Jacques, Président-Directeur Général d’Allianz France
  • DEREZ Thierry, Président-Directeur Général de Covéa
  • DESSIRIER Stéphane, Directeur Général de MACSF
  • DEMURGER Pascal, Directeur Général de la MAIF
  • RELECOM Charles, Président-Directeur Général de SWISSLIFE France

Sur le même sujet

pagebuilder.section.title_description.news

Haut de page